L’héritage des mariniers dans un site exceptionnel
La construction de l’écluse
Située sur la Seine, entre Paris et Rouen et à proximité de Conflans-Sainte-Honorine « capitale des bateliers » à la confluence avec l’Oise, Carrières-sous-Poissy est placée sur un axe navigable majeur.
Vers la fin des années 1970, la première écluse et le barrage à aiguilles de Denouval, devenus obsolètes, furent détruits. En 1878, le Préfet de la Seine et Oise déclenche une opération d’utilité publique. Trois ans sont nécessaires à la réalisation du canal et à la construction de deux nouvelles écluses.
Un canal est creusé à travers le méandre, détachant une langue de terre, qui forme la base de l’île. La terre retirée de la tranchée est placée sur la partie isolée, solution plus rapide et moins coûteuse. Ainsi le niveau de l’île est rehaussé sur un plan non inondable. L’île ainsi créée fait 1260 mètres de long sur 100 mètres de large.
En 1882, l’écluse fonctionne enfin.
L’arrivée des insulaires
L’année suivante, l’État décide de vendre les terrains se trouvant sur l’île de la dérivation. L’enchère est emportée par le banquier Vidal-Naquet pour 20 000 Francs. De 1883 à 1902 l’île est laissée en l’état. Le 2 octobre 1902, Monsieur Joseph Verte se porte acquéreur et devient le nouveau propriétaire.
Les bords de Seine sont à la mode, c’est l’époque des guinguettes. Les Parisiens sont prêts à acheter ces terrains. Monsieur Verte propose un plan de lotissement.
Une publicité est alors diffusée vantant les mérites de l’île : « Cette île avec ses beaux arbres séculaires, n’est jamais submergée, elle est située à l’endroit le plus poissonneux des environs de Paris. Les acquéreurs auront le droit de circulation sur le pourtour de l’île, par les chemins de halage reliés par les rues créées aux extrémités. Le prix variera entre 1 franc et 1 franc cinquante le mètre, les plus grandes facilités de paiement seront accordées ».
Les lots trouvent rapidement acquéreurs. Autour de l’écluse la vie s’organise, un restaurant apparait sur la berge : le restaurant Hublet (aujourd’hui la grande maison dans le virage de la rue de l’écluse) qui aurait accueilli le Président Poincaré. Sur l’île, on installe une épicerie et un caféguinguette. Le restaurant Pantigny dit « Le Brasseur » doit s’agrandir plusieurs fois. Vers 1915, le restaurant Drécourt ouvre à son tour, il fonctionne jusqu’en 1976.
Vivre sur l’Île
Au milieu des années 1920, la population de l’île étant de plus en plus importante, il devient urgent de créer un syndicat.
Le 27 juillet 1927, Monsieur Charles Roux est élu Président. On se met d’accord sur un règlement de police, on installe l’éclairage public et l’adduction d’eau.
En 1928,
le syndicat entame des procédures auprès de la Préfecture pour obtenir des travaux de voirie, des bouches d’incendie, plus d’éclairage et surtout demander une passerelle. Effectivement, tous les habitants traversent sans autorisation le canal en marchant sur le sommet des portes de l’écluse. Puis un jour le facteur tombe dans l’écluse, heureusement il est sauvé. Mais quelques mois plus tard un garçon boucher meurt noyé.
En 1959,
ce sont 200 personnes dont 30 enfants qui traversent quotidiennement dans des conditions très dangereuses. Le Maire, Joseph Lépicier, fait donc voter au Conseil municipal une délibération pour la construction d’une passerelle. Après une étude du service des Ponts et Chaussées, la passerelle actuelle est installée en 1961.
En 1968,
on organise le ramassage des ordures ménagères puis l’installation du gaz de ville qui résout les problèmes de chauffage.
En 1977,
l’écluse n’est plus adaptée à la navigation moderne. Elle est désaffectée au moment où la grande écluse entre Andrésy et Achères est mise en service.
Avec l’arrêt de l’écluse, l’île devient essentiellement un lieu d’habitation et de promenade. Avec le départ des éclusiers et des bateliers, c’est une partie de la culture Carriéroise qui a disparu, comme par exemple, la tradition des joutes nautiques.